Aujourd'hui je viens de prendre pleinement conscience de l'évolution des méthodes de travail de mon équipe. Quel est l'événement qui m'en a donné l'occasion ? Un simple déménagement. Nous restons dans le même bâtiment ; nous ne faisons que monter d'un étage mais comme dirait Neil Armstrong, "c'est un petit étage pour l'homme, mais un pas de géant pour nos habitudes". Car nous passons en "bureau mobile". Avec le télé travail, nous allons tous partager les bureaux d'un même plateau. Bref, je n'ai pas de bureau "à moi", chacun s'installe sur l'un des bureaux disponibles. Dans ce mode, mieux vaut voyager léger et faire le tri dans ses affaires. J'ai donc fait le ménage dans mes archives et je suis tombé sur des perles que j'avais gardées plus de dix ans, plus par nostalgie qu'autre chose. Flashback sur des séminaires de direction qui datent de 2001 avec une quantité mémorable de slides soporifiques et ternes. Flash back aussi sur les spécifications des projets que j'ai menés. À chaque projet, son classeur avec son sommaire parfaitement imprimé et glissé dans une pochette transparente, ses intercalaires, ses centaines de pages de spécifications ultra détaillées, ses centaines de feuilles parfaitement trouées, ses comptes rendus et ses notes internes avec leurs cartouches dument remplis d'un tas d'acronymes que je n'ai finalement jamais bien compris. En quelques minutes je prenais conscience que depuis aout 2011, je n'imprimais plus rien. Aujourd'hui, toute la vie de mes projets est dans des communautés du réseau social de l'entreprise: les documents, les échanges. Les comptes rendus sont sous forme de billets de blogs, les tâches dans des listes d'actions. Même les spécifications ont fondu comme neige au soleil : plus de docs word détaillés et structurés, mais des storyboards clairs et commentés, jamais imprimés mais uniquement consultés en ligne. Le zéro papier promis dans les années 90 est enfin une réalité. Plus de cahier non plus depuis plus de six mois : j'utilise désormais exclusivement l'iPad, que j'associe à l'excellentissime clavier Logitech ultrathin pour iPad, qui trône fièrement sur mon bureau, et qui a déjà fait pas mal d'émules autour de moi. Plus d'agenda papier non plus, évidemment, et ça depuis mon tout premier pocket PC en Windows CE de 1999, que j'ai retrouvé à cette occasion miraculeusement au fond d'un carton d'archives. Dans quelques jours, plus de dessins griffonnés sur des brouillons de papier non plus : je m'achète le crayon Apple pour iPad pour l'utiliser avec l'application Paper ! Il a fallu se raisonner pour admettre que ces magnifiques classeurs qui décrivent des outils qui n'existent plus, n'ont plus aucune valeur pour l'entreprise, et ne peuvent pas même me servir d'exemple pour mes nouveaux équipiers, puisqu'on ne travaille plus du tout comme cela désormais dans mon équipe. À la rigueur, ces antiques classeurs pourraient intéresser quelques musées qui voudraient montrer aux jeunes générations comment les anciens travaillaient jadis. On pourrait exposer le classeur quelque part entre la pierre de silex et la règle à calcul. Avec un pincement au cœur, j'ai rempli la poubelle de ces magnifiques œuvres littéraires, aussi lourdes qu'une tartiflette un après midi d'été. Je pars le coeur léger, avec un seul et unique carton malgré mes 13 années d'ancienneté. Il contient quelques souvenirs comme mon premier cahier lors de mon arrivée dans l'entreprise, ainsi que ... le classeur de mon dernier projet "old style" pour me rappeler le chemin parcouru. La nostalgie était là, mais je me suis consolé en me disant que jamais, au grand jamais, je n'aimerais revenir en arrière, et piloter mes projets comme dans l'ancien temps, ... il y a seulement un peu plus de deux ans... Cet article a été rédigé sur mon iPhone, debout dans le train de banlieu bondé que je prends chaque soir. Autre changement, autre temps : il y a encore peu de temps, la rédaction d'un article c'était obligatoirement assis devant un bureau avec un ordinateur portable (;->).