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Christophe COUPEZ

Michel Girard : le digital au service de l’enseignement

Le début de la crise COVID 19, le monde de l’enseignement et le monde de l’entreprise sont confrontés aux conséquences de la crise sanitaire qui touche la France comme de nombreux autres pays. Le télétravail est aujourd’hui une nécessité aussi bien pour les salariés que pour les enseignants et leurs élèves.

J’avais publié en janvier 2019 un billet (cliquer ici) dont le titre évocateur positionne le débat : « les grandes écoles : pas intéressées par le digital interne ? ». J’y parlais du manque d’intérêt des écoles sur deux choses primordiales : l’usage des outils au sein du cursus scolaire et l’enseignement des méthodes managériales avec le digital.

Dans le contexte que nous connaissons, j’ai pu échanger avec Michel Girard qui m’a fait part de son expérience digitale dans le monde de l’enseignement, notamment avec Teams. A l’heure où les professeurs sont confrontés à des problèmes majeurs pour assurer un enseignement à distance, Michel Girard nous fait part ici de son retour d’expérience de l’usage d’Office 365.

Michel, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je suis enseignant en informatique en BTS SIO et au DIIAGE , formation bac + 5 qui débouche sur un titre d’expert en informatique, en développement ou systèmes et réseaux.

Dans ce master, j’ai également le rôle de responsable pédagogique en charge des contenus de la formation.

Par ailleurs, j’administre les ressources Office 365 pour le CUCDB, le centre universitaire auquel le DIIAGE est rattaché.

Quand et comment vous êtes-vous intéressé aux outils digitaux ?

Notre école a toujours été liée aux technologies Microsoft : étudiants et enseignants passent des certifications professionnelles depuis 1994, nous suivons les évolutions notamment en participant aux événements tels que les Microsoft Expériences et grâce aux échanges avec les professionnels intervenant dans nos formations.

Dès les premières version béta d’Office 365, nous avons utilisé cette plateforme pour organiser les cours, le partage des ressources, les plannings, …. jusqu’à y intégrer toute notre communication avec des sites Sharepoint et les services de messagerie Exchange.

Quel usage faîtes-vous de ces solutions dans le milieu scolaire et quels sont les retours de vos élèves ?

En décembre 2017, Teams existait depuis 6 mois et, avec mes étudiants, nous l’utilisions pour créer les espaces de travail collaboratifs autour des projets de développement. Trouvant l’application “géniale”, mes étudiants ont suggéré d’étendre son utilisation aux autres enseignements.

Nous avons alors décidé de créer une équipe de binômes étudiant /professeur qui avait pour objectifs d’échanger sur les pratiques pédagogiques, les usages des outils et leur manipulation. Ce projet a ensuite été présenté à Microsoft E2 2018 à Singapour, où j’ai rencontré un autre passionné d’Office 365 dans l’enseignement : Eric Dronneau.

Bien sûr, tous ces échanges ont été réalisés avec Teams. Depuis ce projet, les enseignants avec les étudiants n'ont cessé de faire évoluer leurs pratiques pédagogiques en ayant toujours à l’esprit d’améliorer la collaboration, la communication, la créativité et l’esprit critique, c’est-à dire les compétences du 21ième siècle.

Nous sommes arrivés à une co-construction des contenus et de la pédagogie : à titre d’illustration, dans les cours de développement, nous utilisons une approche basée sur les projets. A partir d’un contexte et de besoins fonctionnels, les groupes d’étudiants mettent en place l’architecture applicative, les ressources, une approche agile et nous les accompagnons dans le développement.

À la fin de chaque projet, l’ensemble des participants se réunissent pour une rétrospective afin de déterminer des axes d’amélioration, en privilégiant l’efficience des interventions et le transfert de compétences.

Ici encore, Teams a permis de fluidifier la communication : les résultats ont été tellement positifs que nous avons supprimé l’utilisation des emails dans la pédagogie !

En 2018, pour Microsoft E2, avec l’aide de Cristina Pop et Nathalie Matthieu, enseignantes en Anglais, nous avons publié une synthèse de notre expérience (Expérience Pédagogique avec Microsoft Teams - cliquer ici) : nous étions alors loin de penser aux résultats à venir ….

Les écoles semblent hermétiques au digital comme je l’ai expliqué en introduction. Est-ce aussi votre constat ?

Je n’irais pas jusqu’à dire que les écoles sont hermétiques au digital, mais il est vrai qu’elles rencontrent des difficultés car elles sont confrontées à une triple problématique :

  1. L’évolution du digital et de son importance : les écoles ont du mal à se rendre compte de l’impact du digital sur l'apprentissage, nos pratiques de tous les jours sont conditionnées par les ressources disponibles et les contraintes du système existant,

  2. Les nouvelles générations d’apprenants : les nouveaux apprenants arrivent avec une culture digitale très développée, ils ont une véritablement aisance dans la manipulation des outils, pensent téléphone portable d’abord

  3. Et la nécessaire synergie entre écoles et entreprises : les écoles ont du mal à comprendre l’impact du digital dans les entreprises par manque des liens plus étroits avec les professionnels.

Mais certaines pratiques pédagogiques sont très éloignées de la réalité du digital dans les entreprises :

  1. L’utilisation du digital date : la clé USB est trop souvent montrée comme la solution de transfert de documents, les documents Word sont vidéo projetés et les élèves recopient ! La majeure partie des évaluations sont réalisées sur papier,

  2. Les enseignants envoient des emails et les étudiants répondent par chat, le téléphone portable n’est que peu souvent utilisé, ( à titre d’exemple : recopier le tableau? Non on prend une photo, on la colle dans OneNote et on ajoute les commentaires : la solution est plus rapide !)

  3. Trop peu nombreuses sont les évaluations qui autorisent l’accès à l’internet : peut-on imaginer travailler en entreprise sans avoir accès à l’Internet ?

Or étudiants et enseignants sont dans la même équipe et poursuivent les mêmes objectifs : l’amélioration continue, l’acceptation du changement, le transfert de compétences, en intégrant les professionnels et les pratiques d’entreprise : ce sont ces dimensions qu’il nous faut intégrer dans nos enseignements.

C’est ce que nous avons fait au DIIAGE : en partant des besoins des entreprises, nous avons une nouvelle approche qui, dès sa conception, intègre le digital.

Dans le cadre du confinement, comment ça se passe pour les enseignants en ce moment ? Quels conseils pouvez-vous leur donner pour télétravailler avec leur classe ?

On peut vraiment parler de choc : la majeure partie des enseignants n’étaient pas préparés à cette situation, car ils ne l’avaient jamais vécue et ils n’avaient pas imaginé quelles contraintes elle pourrait engendrer.

Les Espaces Numériques de Travail (ENT) sont conçus pour un modèle d’enseignement en présentiel, les enseignants avaient mis en place une stratégie d’enseignement à distance, mais , dès le premier jour, les enseignants ont manqué d’un moyen de communication efficace et adapté à nos étudiants : sur mobile, en mode messagerie instantanée, avec accès partagé immédiat aux ressources en ligne.

Par exemple, comment le professeur peut répondre à cette demande “pouvez-vous me montrer sur mon travail ce qui ne va pas et m’expliquer comment je dois le modifier?” : les réponses par emails, par message , par document , par référence de site peuvent convenir, mais quelle n’est pas la pertinence d’un appel en visio conférence, partage de l’écran et prise de contrôle à distance, avec discussion sur le problème ?

C’est pourquoi, avec les enseignants utilisateurs d’Office 365 et Teams, nous avons rédigé à destination de nos collaborateurs un document de synthèse sur nos utilisations pédagogiques des outils tels que Teams, OneNote, FlipGrid, Wakelet, Stream, WhiteBoard, et sur nos suggestions pour répondre aux besoins d’enseignement à distance.

Pendant toute cette première semaine, nous avons accompagné nos collègues dans la prise en main technique des outils et les pratiques pédagogiques associées en répondant aux questions par messages instantanés, par vidéos, par démonstrations en direct et par prises de contrôle à distance : tout ceci n’aurait pas pu être réalisé sans Teams.

Pour télé enseigner, il faut avoir une posture de collaboration et gérer l’ensemble des paramètres des télé étudiants. Le contenu de la session de cours doit intégrer tout l’environnement des participants (le débit de la connexion, l’espace de travail et son environnement avec toutes les tentations et le stress) et permettre de créer un climat de confiance autorisant la participation active de tous.

Ainsi dans ma dernière intervention, je suis celui qui a le moins pris la parole : les étudiants ont préparé leurs exercices en amont et ils ont construit la correction ensemble. J’ai géré la réunion en donnant la parole à chacun, en les faisant interagir ; en fin de réunion, tous les participants s’expriment sur le déroulement de la session afin d’améliore les prochaines.

Il faut privilégier la qualité de l’échange à sa durée : les cours sont moins longs de 30 à 60 minutes, toujours enregistrés afin de permettre la ré écoute (particulièrement appréciée par les étudiants) , et une enquête est réalisée, renforçant ainsi la relation entre apprenant et accompagnateur !

Concrètement, comment se passe un cours ?

Voici un exemple de cours. Tout d'abord, les étudiants sont informés du contenu du cours :

Ils reçoivent une information de la réunion :

Les liens des ressources du cours mis à disposition à l’aide une collection wakelet :

À la fin du cours une vidéo de synthèse est réalisée afin de reprendre les éléments du cours et donner les travaux à réaliser :

Et à la fin du cours, on fait une enquête :

Quel est le retour sur expérience ?

Ce qui est remarquable, c’est la dynamique entre les enseignants et les étudiants : tous collaborent pour améliorer leurs pratiques. Nous parlerons certainement des pratiques pédagogiques d’avant et d’après covid-19 !

Le 14 mars 2020, nous avions 308 utilisateurs courants dans Teams. Cinq jours plus tard, nous en avions plus de 1000, trois fois plus. Apparemment, le mouvement est lancé.

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